Organisation et conditions de travail en EHPAD
La dernière enquête de la DREES investigue les conditions de travail des soignants (IDE, AS, AMP et AVS) en EHPAD, dans ses différentes dimensions : organisation du temps de travail, organisation du travail, pénibilité physique, charge émotionnelle, et l’avenir professionnel.
Cette étude montre qu’au-delà des disparités liées aux fonctions ou au statut de leur EHPAD (privé lucratif ou non lucratif, hospitalier), une même identité se retrouve pour tous ces professionnels.
Cette enquête qualitative montre en effet, malgré le constat de la pénibilité, un fort engagement individuel, et de multiples gratifications (provenant d’une relation privilégiée avec les usagers, leurs familles, l’établissement et les collègues).
Une charge de travail vecue comme importante en EHPAD
On compte environ 8 000 EHPAD en France (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes).
Ces établissements emploient 361 000 professionnels (ETP) et accueillent près de 600 000 personnes. La prise en charge des résidents est assurée par des professionnels aux compétences variées : IDE (Infirmiers diplômés d’Etat), AS (Aides-soignants), AMP (Aides médico-psychologiques, AVS (Auxiliaires de vie sociale), ASH (agents de services hospitaliers), et personnels non soignants.
Dans cette enquête, les personnels soignants interrogés notent un alourdissement de leur charge de travail du fait de l’évolution des publics, avec davantage de taches liées au soins, nursing et hygiène, et un plus faible accompagnement relationnel, humain et de maintien des capacités.
La pénibilité mentale est également perçue comme forte avec le renouvellement fréquent des résidents, les accompagnements en fin de vie,…Il est également noté comme nécessaires pour les soignants de s’adapter à de nouveaux publics (pathologies démentielles, personnes handicapées vieillissantes, troubles psychiatriques, présence de conduites addictives).
Ces évolutions conduisent à un ressenti des difficultés d’exercice : chute, fugue, violences verbales et physiques, …Ce changement du profil des résidents d’EHPAD accroit la charge mentale des soignants, d’autant plus lorsque les spécificités correspondantes n’ont pas été prises en comptes dans la formation des équipes ou l’organisation de l’EHPAD.
Des évolutions dans l’organisation du travail
L’accroissement de la médicalisation s’est par ailleurs accompagné d’objectifs en termes de qualification des personnels, synonyme de qualité des soins pour les résidents les plus fragiles.On observe par ailleurs peu de mobilité professionnelle entre EHPAD et secteur sanitaire.
Les dernières évolutions réglementaires ont également conduit à développer la traçabilité des actes de soins (avec de plus en plus des supports dématérialisés), les démarches qualité et procédures. Mais ces évolutions conduisent à des changements culturels parfois difficiles à accepter, notamment pour les professionnels les plus anciens qui peuvent percevoir ceux-ci comme inutiles, réalisés au détriment des prises en charges directes, ou encore comme un manque de confiance.
Il apparaît également une homogénéité d’un établissement à l’autre dans le contenu du travail en EHPAD des différents métiers soignants, avec un caractère souvent répétitif mais en revanche une grande autonomie dans la réalisation de leurs missions.
L'optimisation des organisations et la recherche d'efficience conduisent les soignants interrogés à faire part d’un accroissement des cadences, avec la prise en charge de personnes âgées de plus en plus dépendantes, sans accroissement important des moyens.
L’organisation du temps de travail (horaires, ..) est souvent hétérogène entre établissements et fonctions. Certaines organisations sont ainsi notées comme générant une charge de fatigue plus importante (roulements avec une seule journée de repos dans la semaine, amplitude horaire, alternance jour nuit…).
Un autre enjeu important pour les professionnels des EHPAD concerne l’articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle. L’absentéisme est noté comme désorganisant souvent les services (nécessité de remplacer un collègue, fonctionnement dégradé, …).
Une forte implication des soignants
Le travail en EHPAD est perçu comme présentant une pénibilité à la fois physique (station debout, manutentions…) et psychique (situations de stress, conflit, effet miroir…) , mais inhérent au métier.
On peut noter que les soignants mettent souvent en avant la vocation et le choix pour expliquer leur orientation professionnelle. Une grande majorité des professionnels rencontrés lors des entretiens réalisés lors de cette étude affirment aimer leur métier. Cet attachement est ainsi d’abord orienté vers la signification et la place de leur métier dans la société : prendre soin, apporter du bien-être, soulager les personnes fragiles…
Les professionnels ont ainsi une perception très positive de leur métier, malgré la perception d’un manque de reconnaissance de la part du public, et malgré la pénibilité évoquée précédemment.
Ils apprécient également les échanges avec les résidents, avec une dimension émotionnelle de l’attachement aux personnes accueillies, constituant une gratification majeure pour les équipes qui travaillent en EHPAD.
Les soignants notent également que leur travail est un travail collectif avec en corollaire la constitution d’équipes, la répartition et le partage des tâches et les pratiques de solidarité.
Ils observent également la difficulté du travail pluridisciplinaire et perçoivent de façon inégale la reconnaissance, que ce soit par la hiérarchie ou par la société.
Cette étude met également en avant l’importance et le rôle de la direction et de l’encadrement, notamment dans la négociation et le pilotage des moyens, la reconnaissance du travail réalisé, le soutien, et la responsabilisation des équipes.
Pour en savoir plus: « Des conditions de travail en EHPAD vécues comme difficiles par des personnels très engagés », Les Dossiers de la Drees, n°5, Drees, septembre 2016.